Lorsque le salarié au cours de l’exercice de son contrat de travail commet une faute lourde ou grave justifiant son licenciement, l’employeur se doit de respecter les règles légales de procédure pour licenciement. Toutefois, cette rupture du contrat ne peut intervenir dans des circonstances vexatoires, et ce, de façon intentionnelle ou non. Le salarié est en droit de demander réparation du préjudice pour atteinte à sa dignité ou pour discrédit en saisissant le Conseil de prud’hommes compte tenu du préjudice moral causé.

I - Quelles sont les conditions pour qu’un licenciement soit reconnu comme vexatoire ?

La jurisprudence considère qu’il y a licenciement vexatoire dès lors que la procédure de licenciement a occasionné un préjudice au salarié en raison de circonstances vexatoires entourant son départ. En d’autres termes, l’évincement du salarié de l’entreprise après l’entretien préalable au licenciement, même pour faute grave du salarié ou lourde, ne peut se faire sans ménagement. (Cour de cassation, chambre sociale, 30 mai 1995, 93-43.854, inédit). Elle dégage cette notion en citant l’ancien article 1382 du Code civil, actuel 1240 qui est le fondement même de la responsabilité civile. Des demandes de dommages et intérêts sur ce fondement sont donc légitimes. Toutefois, il appartient au salarié de prouver que les conditions vexatoires à l’origine de son préjudice moral sont remplies (Cour d’appel de Lyon – ch. sociale B 6 mai 2022, n° 19/04980 ; Cour d’appel de Versailles – ch. 19 20 avril 2022 / n° 19/01702).

Le salarié doit :

  • Prouver les circonstances humiliantes dont il a fait l’objet durant la procédure de licenciement.
  • Être victime d’un préjudice distinct de celui du licenciement à proprement parler. Par exemple, le caractère brutal du licenciement, atteinte à son image…

II - Exemples de circonstances vexantes ayant fait jurisprudence

Dans une décision en date du 9 novembre 2017, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi intenté par l’association Centre Dentaire Nord Magenta contre l’une de ses salariées concernant des dommages et intérêts à allouer à cette dernière au titre d’un licenciement pour motif vexatoire, à la somme de 2000 €, en raison d’une mise à pied conservatoire de longue durée alors que le licenciement ne reposait lui-même sur aucune cause réelle et sérieuse, et présente un caractère vexatoire avéré étant à l’origine d’un préjudice moral de la salariée. Les conditions vexatoires du licenciement étant remplies, cette dernière a droit à une indemnisation spécifique distincte des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (9 novembre 2017, Cour de cassation, Pourvoi n° 16-18.096, chambre sociale, formation restreinte, RNSM/NA).

Dans une autre décision, la jurisprudence a pu considérer que le salarié dispensé de sa période de préavis ne pouvait de ce fait saluer ses collègues et expliquer les circonstances de son départ. (Cass. soc. 27 septembre 2017, n° 16-14.040).

Dans une autre espèce, une salariée avait été évincée sans ménagement de l’entreprise. Ce comportement fautif était à l’origine d’un préjudice moral distinct de celui résultant du licenciement (Cour de Cassation, Chambre sociale, du 30 mai 1995, 93-43.854, Inédit).

A contrario, le salarié qui ne justifie aucunement l’existence d’un préjudice au titre d’un licenciement vexatoire ne peut prétendre à des dommages et intérêts alloués sur ce fondement (Cour d’appel de Versailles – ch. 19 20 avril 2022 / n° 19/01702).

Les décisions en matière de licenciement pour motif vexatoire sont prolifiques. Toutefois, les Juges n’accordent pas systématiquement des dommages et intérêts pour ce motif, car conditionné à la démonstration par le salarié de la preuve du caractère vexatoire de son licenciement.

III - Quel recours en cas de licenciement vexatoire ?

Si le salarié remplit les conditions pour prétendre à une indemnité au titre du licenciement vexatoire, à savoir : un préjudice moral (atteinte à sa réputation professionnelle, offense à son image, sentiment avéré d’humiliation au travail…) suite à une procédure de licenciement attentatoire à sa dignité ou occasionnant un discrédit, autrement dit le salarié a été licencié de manière vexante et brutale, il peut saisir le Conseil de prud’hommes pour réparation.

Cette action est valable même en cas de licenciement pour cause réelle et sérieuse, tel un licenciement pour faute grave à la suite d’une mise à pied conservatoire. Car aucune situation ne justifie une décision et un comportement de l’employeur disproportionnés aux faits reprochés.

Ainsi, si le Juge reconnaît que le salarié a été victime d’un licenciement vexatoire (donc fondé à demander réparation) il prononce des dommages et intérêts à l’encontre de l’employeur distincts des indemnités alloués au salarié pour licenciement sans cause réelle et sérieuse fondés sur le barème Macron, par exemple.

IV - Quelles sont les indemnités auxquelles peut prétendre le salarié vexé par la manière dont on l’a licencié ?

Le salarié peut uniquement obtenir des dommages et intérêts pour motif vexatoire suite à son licenciement. Les Juges peuvent lui accorder une indemnisation « mesurée » à hauteur de son préjudice. Les sommes sont variables et dépendent des cas. Par exemple, un salarié victime d’un licenciement vexatoire peut obtenir une réparation spécifique à ce titre de 500 € (Cour d’appel d’Aix-en-Provence – Pôle 04 ch. 05 14 avril 2022 / n° 19/16983), là où un autre, au regard des circonstances obtiendra 20 000 € (Cour d’appel de Rennes – Ch. prud’homale 08 11 mars 2022 / n° 18/07925).

Démarrez la procédure