Lors de la conclusion d’un Contrat à Durée Déterminée (CDD), les parties peuvent prévoir une période d’essai durant laquelle la relation contractuelle peut être rompue librement et sans motif particulier. Cette phase devenue incontournable est strictement encadrée par des règles différentes de celles applicables au Contrat à Durée Indéterminée (CDI). Quelle est la durée de cette période transitoire ? Quelles sont les précautions à prendre par les parties qui souhaitent la rompre ? Voici tout ce qu’il faut savoir pour ne pas commettre d’erreur.

Quelle est la durée de la période d’essai pour un CDD ?

L’article L1221-20 du Code du travail définit la période d’essai comme une phase qui permet :

  • À l’employeur d’évaluer les compétences du salarié ;
  • Et au salarié d’apprécier si le poste est conforme à ses attentes.

En cas d’insatisfaction, les parties sont en principe libres, sauf stipulations conventionnelles ou statut protecteur particulier, de mettre fin au contrat de travail sans justification.

La période d’essai ne se présume pas. Elle est facultative, mais dès lors que les parties conviennent d’en fixer une, elle doit être mentionnée expressément dans le contrat de travail avec sa durée et ses modalités de renouvellement.

Durée et décompte de la période d’essai dans le cadre du CDD

Selon l’article L1242-10 du Code du travail, la durée de la période d’essai dépend de la durée du CDD et non de la catégorie professionnelle du salarié, comme cela est le cas pour un CDI.

Sauf accords de branche ou dispositions conventionnelles spécifiques, la durée de la période d’essai dans le cadre d’un CDD est égale à 1 jour par semaine, dans la limite de :

  • 2 semaines pour une durée initiale inférieure ou égale à 6 mois ;
  • 1 mois pour une durée initiale de plus de 6 mois.

Pour les CDD à terme précis

Ou de date à date, il est tenu compte de la durée initiale du contrat indépendamment des éventuels renouvellements intervenus (Cour de cassation. Chambre sociale. 28 mai 1991. n° 88-44.357).

Pour les CDD sans terme précis

L’échéance n’est pas connue à l’avance (Ex. : un CDD de remplacement conclu jusqu’au retour du salarié), le calcul est effectué sur la base d’une durée minimale prévue au contrat.

La période d’essai exprimée en jours, en semaine ou en mois se décompte en jours calendaires. Il s’agit de tous les jours de l’année civile y compris les jours fériés et chômés (non travaillés). Il n’est pas tenu compte ici du nombre de jours ouvrés (Cour de cassation. Sociale. 28 avril 2011. n° 09-72.165). Par exemple, une période d’essai qui débute le 1er mars prendra fin le 31 mars.

La période d’essai peut-elle être prolongée ?

Lorsqu’un salarié est déclaré en arrêt de travail pour maladie ou accident en cours de période d’essai, sa durée est automatiquement prolongée du nombre de jours d’absence (dans la limite de la durée de la période d’essai restant à courir). Les mêmes règles s’appliquent en cas de prise de congés.

En revanche, contrairement aux règles applicables en cas de CDI, il n’est pas possible de renouveler la période d’essai d’un CDD, même en présence d’un accord entre les parties.

ATTENTION : si l’employeur fixe une période d’essai d’une durée supérieure à ce que prévoient les dispositions légales ou conventionnelles et met fin au contrat après le terme autorisé, la rupture s’analyse en une rupture anticipée illicite du CDD. Elle ouvre alors droit pour le salarié à des dommages-intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçu jusqu’à la fin de son contrat (Cour de cassation. 16 octobre 1991. n° 88-43.771).

Incidence d’une succession de contrats sur la durée de la période d’essai

À l’expiration d’un CDD, il peut arriver qu’un salarié soit embauché par la même entreprise, sans délai sous CDI ou dans le cadre d’un nouveau CDD (si les conditions de la succession sont réunies).

Cette succession de contrats a une incidence sur la durée de la période d’essai.

En cas de CDD immédiatement successifs conclus entre les mêmes parties

Il ne peut y avoir de période d’essai que pour le premier contrat. Une période d’essai stipulée dans le second contrat n’est licite que s’il a été conclu pour pourvoir un emploi différent (Cour de cassation. Sociale. 05/10/16, n° 15-16.384 et 5 octobre 2016. n° 15-16384).

En cas de CDI faisant suite au CDD

La durée du CDD est déduite de la période d’essai éventuellement prévue au nouveau contrat.

Comment rompre un CDD en cours de période d’essai ?

Le CDD peut être rompu à tout moment pendant la période d’essai par le salarié ou par l’employeur. Mais en dépit de cette liberté, des conditions doivent être respectées par les parties au contrat.

Les conditions de forme de la rupture

Sauf dispositions conventionnelles ou contractuelles contraires, il n’y a pas de formalisme particulier à respecter. Il est cependant fortement conseillé de notifier cette décision par lettre recommandée avec AR ou lettre remise en main propre contre récépissé.

Cela permet de prouver que la rupture est bien intervenue avant la fin de la période d’essai, et de dater le début du délai de prévenance prévu par la loi.

ATTENTION : dans certains cas, l’employeur doit respecter une procédure spécifique avant de rompre le CDD en cours de période d’essai :

  • S’agissant des salariés protégés : il doit au préalable obtenir l’autorisation de l’inspecteur du travail (Cour de cassation. Sociale. 26 octobre 2005 n° 05-43.110) ;

  • S’agissant des salariés en arrêt pour maladie ou accident professionnel : la rupture de la période d’essai n’est pas possible pendant cette suspension du contrat. Cependant l’employeur peut licencier son salarié, s’il constate une faute grave ou lourde. Il doit en ce cas respecter la procédure de licenciement disciplinaire.

Si l’employeur décide de mettre fin à la période d’essai pour un motif disciplinaire, il doit mettre en œuvre une procédure de licenciement (Cour de cassation. Sociale. 14 mai 2014, 13-13.975).

L’employeur qui rompt le CDD pendant la période d’essai n’est tenu de verser aucune indemnité au salarié, à l’exception de l’indemnité compensatrice de congés payés au prorata du travail accompli.

Le respect d’un délai de prévenance

La loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 « portant modernisation du marché du travail » impose aux parties de respecter un « délai de prévenance » en cas de rupture d’un CDD stipulant une période d’essai d’au moins 1 semaine. Il s’agit d’un délai de « préavis » qui s’écoule entre la notification de la rupture et le jour où elle devient effective.

Si elle est à l’initiative du salarié

Ce dernier doit respecter un délai de prévenance de (article L1221-26 du Code du travail) :

  • 24 heures : si sa présence dans l’entreprise est inférieure à 8 jours ;
  • 48 heures au-delà.

Si elle est à l’initiative de l’employeur

Le salarié doit être prévenu dans les délais minimums suivants (article L1221-25 du Code du travail) selon sa durée de présence dans l’entreprise :

  • Inférieure à 8 jours : 24 heures ;
  • Entre 8 jours et 1 mois de présence : 48 heures ;
  • Après 1 mois de présence : 2 semaines ;
  • Après 3 mois de présence : 1 mois.

ATTENTION : Ce délai ne peut en aucun cas prolonger la durée de la période d’essai au-delà des durées maximales légales. À défaut de respecter ce délai, l’employeur s’expose à verser à son salarié, sauf faute grave, une indemnité compensatrice égale au montant de la rémunération qu’il aurait dû percevoir s’il avait travaillé jusqu’au terme du délai légal de prévenance (indemnité de congés payés comprise) (ordonnance n° 2014-699 du 26 juin 2014 et article L1221-25 modifié du Code du travail).

Rupture abusive de la période d’essai

Les parties peuvent mettre fin au contrat en cours de période d’essai de façon discrétionnaire et sans avoir à motiver leur décision, mais cette liberté trouve une limite dans l’abus de droit.

Le salarié pourra ainsi contester la rupture de son contrat notamment dans les cas suivants.

Le détournement de la finalité de la période d’essai

Cette période ayant pour objet d’apprécier les qualités professionnelles du salarié, l’abus est constitué lorsque l’employeur y met fin pour un motif non inhérent à la personne du salarié.

Est ainsi considérée comme abusive, la rupture :

  • Motivée par la perturbation de l’entreprise du fait d’arrêts maladie du salarié pendant la période d’essai (Cour de cassation. Sociale. 10 avril 2013. n° 11-24.794) ;

  • Intervenue après qu’une salariée se soit plainte de faits de harcèlement sexuel (Cour de cassation. Sociale. 12 février 2014 n° 12-26.652) ;

  • Reposant sur un motif économique (Cour de cassation. Sociale. 20 novembre 2007. n° 06-41.410).

La légèreté blâmable

Elle est retenue lorsque l’employeur prend l’initiative de mettre fin à la période d’essai de façon précipitée, sans laisser suffisamment de temps au salarié pour faire ses preuves (Cour de cassation. Sociale. 31 janv. 2018. 16-19.669).

La rupture est fondée en réalité sur un motif discriminatoire :

  • Les articles L1132-1 à L1132-4 du Code du travail étant applicables à la période d’essai, l’employeur ne peut fonder sa décision sur une discrimination (état de grossesse, maladie…) ;

  • Le salarié qui apporte la preuve d’un abus de droit peut saisir le Conseil de prud’hommes afin d’obtenir, le cas échéant, des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. Le montant est alors librement apprécié par le Juge.

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